vendredi 30 avril 2010

La cordillère blanche

A une nuit de bus de Lima, nous débarquons à Huaraz. La ville est moche, mais pardonnons-leur, les tremblements de terre et les coulées de boue sont passés par là. Si la cité est quelconque, l'environnement est impressionnant. Une chaîne de sommets à chapeaux blancs, nommée "La cordillère blanche", dépassant les 6000m, borde la ville d'un côté. De l'autre côté, une autre chaîne de montagnes, plus basse et plus sombre, "La cordillère noire", que nous rebaptisons "cordillère verte" car en cette période de l'année, ses versants verdoient. Nous partons à la découverte de ses reliefs hallucinants. Nous suivons la vallée en longeant les deux cordillères parallèles. Au détour d'un chemin, après le passage d'un torrent, à la faveur d'une partie d'escalade, nous découvrons plusieurs lagunes cachées d'une beauté inouie.



Dans un cirque de pics clairs, quelques canards à col rouge pataugent dans les eaux turquoises. La fonte des hauts glaciers aux reflets bleutés confère à ces retenues d'eau une couleur indescriptible, inimaginable, et extraterrestre. Un sentiment puissant de vivre un instant grandiose nous anime. Le Huascaran, le Quitaraju, et le Pyramide sont autant de sommets qui rivalisent de splendeur. Nous marchons et marchons encore pour en voir le plus possible. Nous nous reposons une journée à Caraz, petite ville où les femmes des campagnes avoisinantes font la queue une fois par mois depuis le guichet de la banque jusque dans la rue et jusqu'à la place centrale pour retirer leur pension de survie.


Nous rencontrons Pierre et Pierre, deux Bretons en baroude. Par chance, l'un d'eux est ostéopathe et soignera le pied douloureux de Nico (en dénouant une tension d'estomac...). Par chance aussi, ils partagent comme nous le même goût pour les apéros à rallonge en terrasse . En leur compagnie, nous "niquerons plusieurs mousses", comme ils disent, en échangeant des bons plans de voyageurs.


Le lendemain, dès l'aube, nous attaquons la rando classique de Santa Cruz. Trois longues journées de marche nous font partir de 3000m jusqu'au col de Punta Union à 4750m, pour redescendre dans la vallée de Vaqueria de l'autre côté. Le premier jour, nous bravons des nuées de moustiques pot-de-colle pour camper dans une prairie habitée de vaches très curieuses qui viennent nous renifler de près. Nous croisons aussi des ânes à l'appétit sexuel débridé. Suivant sans relâche la femelle de son coeur, le mâle se trimballe avec le membre dur qui pendouille et oscille comme un pendule alors qu'il court après sa partenaire qui le fait mijoter.

Nous déplions la tente peu avant le coucher du soleil. Nico se lance dans un dessin alors que la lumière et la température baissent. Il ne s'est jamais autant gelé les mains pour dessiner.


Nous nous préparons ensuite un repas rapide à la lampe frontale. La nuit tombe et le vrai froid arrive. A 4000m le premier soir, nous éteignons le feu avant 20h et survivrons grâce à nos triples épaisseurs de vêtements.
Nous débarrassons le plancher aux aurores le lendemain. Nous poursuivons notre ascension. Nous atteignons le coeur de la cordillère où nous tutoyons les sommets les plus hauts.

Mais en fin d'après midi, le temps se gâte. La pluie et la neige font leur apparition. Nous franchirons le col dans une purée de pois et profiterons à peine de la vue que nous devinons exceptionnelle. Nous campons le second soir près du passage du col en espérant une amélioration du temps pour le lendemain. Nous plantons donc la tente à 4600m dans les herbes hautes et humides au bord d'une lagune sombre. Le froid nous encercle rapidement. Nico redouble les couches sur son dos pendant que Mag dort tranquillement dans son épais duvet en plumes de canard. Selon Nico, elle supporterait à coup sûr une nuit dans un congélateur.
Au réveil, les nuages de pluie ne semblent pas pressés de partir. Nous attendons en vain une accalmie pendant plusieurs heures. Nous entamons ensuite la longue descente vers la sortie du parc. En fin de journée le ciel s'éclaircit. Nous profitons du retour du soleil pour rater de quelques secondes notre bus qui rentre au village. Nous attendrons quasiment deux heures que le suivant nous prenne. Nous continuons alors la descente de nuit (exactement ce que nous voulions éviter), empruntant des lacets à flanc de ravin sur un chemin de pierre défonçé. Les précipices sont vertigineux et les lueurs des villages en contrebas nous paraissent lointains. Le front transpirant, nous prions le ciel à chaque virage, à chaque trou de ne pas nous renverser. Nous manquons à plusieurs reprises de repeindre en marron le fond de notre froc. Ce voyage en bus est le pire que nous ayons vécu. Il déboucherait le transit de la reine des constipées. Mais nous arrivons à destination en entier. Nous retrouvons une bonne auberge et un bon lit au chaud...

dimanche 11 avril 2010

Lima


Nous continuons à remonter le pays en direction de la capitale. Avant d'y arriver, nous abordions cette mégalopole avec réticence. Des histoires folles circulent entre voyageurs à propos de cette ville gigantesque. Des histoires à foutre la trouille: des embrouilles et des rapines en pagaille, des touristes détroussés par millions, des mômes de 4 ans qui auraient lynché en plein hiver une jeune Allemande handicapée mentale à coups de barre à mine rouillée...
Bref, s'aventurer à Lima siginifierait risquer sa peau. Un tiers des habitants du Pérou se concentre ici, charriant son lot de misère et de violence bestiale. L'arrivée en bus par les faubourgs malfamés ne laissait augurer rien de bon.


Or, quand nous posons nos sacs dans le quartier chic de Miraflores, au bord du Pacifique, nous découvrons une ambiance tranquille. Nous sommes reçus à l'auberge "Kinacopéru" comme des enfants prodigues de retour d'exil. Maria et Aymet, les mamas péruviennes, nous accueillent avec une gentillesse rare et nous installent comme des rois. Elles nous mettent à l'aise rapidement et engagent la discussion avec sincérité. Cette adresse se révèlera la meilleure que nous ayons connu depuis le début du voyage.


Profitant de tout le confort dans une ambiance familiale relaxante, nous passons une petite semaine à savourer les bons côtés de Lima: promenades le long des falaises surplombant la baie de plages, incursion dans le vieux centre colonial foutraque mais vivant, dégustation au salon gastronomique en plein air... Envers et contre la réputation de Lima, nous flânons l'esprit tranquille.



Maria, fan de la culture française, se branche chaque jour sur TV5 monde, sans rien comprendre, simplement pour entendre du français, une langue chantante pour son oreille. Le premier soir, Maria nous demande de l'accompagner pour entonner une Marseillaise dont elle connaît les paroles par coeur. Elle nous le redemandera le dernier soir au moment de se quitter, puis versera une larme lors de nos adieux émus. Suite à cette rencontre, nous évoquons la possibilité de les accueillir à notre tour une fois rentrés en France. Mais cette éventualité relève de l'impossible. La vieille Europe inflexible et méfiante leur refuse catégoriquement depuis plusieurs années de pénétrer sur notre territoire. Bien qu'elles aient de la famille à qui elles souhaiteraient rendre visite en France, en Italie et en Allemagne, les autorités occidentales ne délivrent aucun visa, même touristique, aux Péruviens moyens. Certainement la peur de compter un émigré squatteur et pilleur d'allocs en plus...

La côte sud du Pérou

Lorsque nous remontions la côte jusqu'à Lima, nous sommes entrés en automne, hémisphère sud oblige. Bientôt, l'hiver pointera le bout de son nez. Comme vous pouvez le constater, le climat est vraiment rude dans la réserve de Paracas et la lagune de Huacachina!



Nazca

Après un dernier verre au Mono Blanco à Arequipa, nous sommes partis vers Nazca au péril de notre vie tellement le chauffeur roulait comme un maniaque sur une route de montagne cabossée en pleine nuit et dans le brouillard au petit matin.

A Nazca, l'unique attraction est de prendre son envol pour admirer les dessins tracés par la civilisation nazcesque, véritablement appréciables vus du ciel. Et donc pour cela, il faut monter à bord d'un coucou quatre places et s'embarquer pour une demi heure de vol au dessus de ces dessins dont la signification reste obscure. Les Nazca ont représenté des animaux, des bestioles, des bonhommes, et des formes géométriques géantes, parfois proches de l'abstraction. Certains chercheurs pensent à un calendrier astral, d'autres évoquent des sentiers sacrés, d'autres encore parlent de canaux d'irrigation. Nous, on a juste trouvé ça chouette.

Pour voir si votre oeil est aiguisé, essayez de localiser, puis de deviner quelle forme se cache dans la deuxième photo. Indice: c'est un animal. On vous laisse vous éclater les yeux devant votre ordi au bureau et on vous donne la réponse plus tard....


Cette première expérience dans un avion modèle réduit fut épique: pour que les passagers de chaque côté puissent observer les figures au plus près, le pilote incline l'appareil à la perpendiculaire, puis pivote, se retourne, fait une boucle, passe dans un trou d'air, refait une boucle et continue son chemin avant de survoler une nouvelle figure. Les estomacs sont mis à rude épreuve. Au final, même si ce vol nous a ravis, nous sommes contents de retrouver la terre ferme, surtout Magali, qui est repartie avec un petit souvenir dans un sac plastique!

La réponse à votre test de vue:

Si vous avez vu une araignée, changez de lunettes.

Si vous avez rien vu, c'est normal. Nous aussi on a galéré en revoyant les photos.

Si vous avez vu un colibri, bravo! Pas besoin de binocles pour vous.