samedi 29 mai 2010

Baños

Après une étape pluvieuse à Cuenca, nous nous sommes enfoncés dans les terres à la lisière de la forêt amazonienne. Baños, petite station thermale chic et tranquille, est le point de départ de nombreuses balades champêtres au pied du volcan Tungarahua, mais surtout le royaume du nougat et de la guimauve. Les Equatoriens en raffolent. Ils se goinfrent aussi de paquets de copeaux de canne à sucre fibreuse qui crisse sous la dent comme du polystirène.

Nous bouderons joyeusement toutes ces saloperies pour consacrer nos dollars à de la vraie cuisine française. Dès le premier soir, nous tombons sur la carte inspirée d'un restaurateur français qui propose une fondue bourguignonne. Nous sautons sur l'occasion et nous gavons de barbaque et de petits légumes du jardin, comme un avant goût de notre retour prochain en Europe. Le mal du pays se ressent cruellement depuis quelques temps et la bouffe devient véritablement une obsession. Nous salivons chaque jour à l'idée de retrouver les bonnes saveurs bien de chez nous.

Ensuite, à l'hôtel, nous nous composons une salade de fruits des grands jours. Ananas, fraises, poires, bananes, pommes, litchis...Nous nous couchons heureux, bercés par une lente digestion. Et là... c'est le drame. Dame Tourista se joue de nos entrailles fragiles. Pendant deux jours, à tour de rôle, nous ouvrons en grand les vannes du robinet à caca. Les rouleaux de torche cul se débobinent à vue d'oeil, puis la tempête passe. Grâce à Mr Immodium, nous profitons de l'accalmie pour prendre l'air, nous dégourdir les jambes, et promener nos derrières endoloris sur les pentes velues du volcan. Après une ascension de 700m, nous arrivons à "la casa del arbol" et nous amusons à voltiger au dessus du vide sur une improbable balançoire abandonnée. En reposant pied à terre, nous nous faisons inviter chez un paysan du coin, qui nous offrira le thé dans sa modeste cahute. Au moment de se quitter, il n'oubliera pas de réclamer un peu de monnaie pour subsister... Le lendemain, nous empruntons des bicyclettes à l'hôtel et partons sur la route des cascades. Nous découvrons "El Pailon del diablo", une chute vertigineuse au confluent de deux fleuves.


Pour finir, en voyant les regards des passants braqués sur les sommets, nous comprenons que dans la nuit du 27 au 28 mai, le volcan s'est réveillé, a craché de la lave sur le versant opposé à Baños et a recouvert de cendres l'immonde Guayaquil. Encore une fois, la malédiction du 27 a frappé, même si nos vies n'ont pas été menaçées cette fois ci.

vendredi 21 mai 2010

Les Galapagos

Nous avons bien fini par nous extirper de la puanteur moite de Guayaquil pour des cieux plus cléments et s'exiler dans l'archipel magique des Galapagos. Peu habitées, gérées par une administration du parc naturel très pointilleuse, les îles restent quasiment vierges et ont à offrir des richesses sauvages inouies.

Réputées pour leur faune et leur flore terrestre et aquatique, ces îles sont un havre de tranquillité pour toutes les espèces que l'on y rencontre. Nous nous sommes promenés au milieu des tortues géantes et centenaires, des crabes aux pinces rouges et des iguanes cracheurs, et aussi baignés avec des otaries joueuses, des poissons multicolores et des requins aveugles. Nous avons également pu contempler le vol majestueux des pélicans, les parades des frégates au goitre rouge et approcher l'incroyable piquero à pattes bleues.

Ces expériences seront les plus marquantes de notre séjour sur ces îles prodigieuses. Nous avons beaucoup navigué, plongé et marché pour découvrir cette foultitude vivante, grouillante et bruyante. En fin de compte nous avons passé un des meilleurs moments de notre voyage grâce à ce calme insulaire si apaisant. Ici, tout le monde est relax et on croise des voyageurs en tout genre: un couple de marins anglais à la retraite qui font le tour du monde à la voile en 5 ans, des plongeurs archéologues marseillais en manque de sensations fortes, des bénévoles au service d'ONG oeuvrant pour la protection des espèces en danger et bien sûr des Amerloques bouffis et rougis sur leur navire de croisières 4 étoiles qui claquent des milliers de dollars pour des excursions hors de prix alors que la nature est à disposition de tous.

Bref, nous avons du mal à quitter ce bout du monde enchanteur, mais nous en garderons un souvenir intense. Nous refermons cette parenthèse paradisiaque et rejoignons le continent, ses routes cabossées et ses longues heures de bus sur des sièges étroits.

jeudi 20 mai 2010

Trujillo, l'extrême nord du Pérou, et la malédiction du 27


Après les instants nature de la cordillère blanche, après notre "Into the Wild" version andine, nous partons plus au nord pour une étape culture. Trujillo est une ancienne ville coloniale et ce bon colon d'Espagnol a de nouveau laissé derrière lui de beaux édifices aux pierres colorées.


Mais avant lui, les civilisations "Moche" et "Chimu"(le "u" se prononce "ou") ont construit des temples et cités dont il reste quelques ruines plus ou moins impressionnantes. Nous multiplions les visites et parvenons ainsi à nous immiscer dans ces cultures totalement nouvelles et d'une richesse artistique considérable (vases, bijoux, poteries...).





Par contraste, les villes à l'extrême nord du Pérou sont d'une pauvreté sociale et culturelle hallucinante. Nous y passerons rapidement avant de retrouver Mancora, la station balnéaire spéciale gringos. Océan à 25 degrés, transats, chaleur tropicale, parasols en bambou, discothèques, alcool et drogues... encore un changement d'ambiance étonnant. Mais nous apprécions néanmoins ces premiers bains dans le Pacifique.


Arrive alors la malédiction du 27.
Souvenez vous:
Le 27 novembre, nous avions passé un mauvais moment à Valparaiso.
Le 27 février, la terre a tremblé au Chili et en Argentine.
Le 27 avril, le mauvais sort s'est acharné. Alors que nous marchions tranquillement sur la plage, deux individus cagoulés et armés de couteaux surgissent des dunes et nous menacent pour prendre notre sac. Nous sommes coincés. Nous essayons de gagner du temps, nous parlons un peu, nous tentons de trouver un échappatoire, mais ces enflures continuent à faire pression. Nous leur lâchons l'appareil photo et par chance, ils s'en contenteront sans fouiller le sac, où se trouvait également la caméra. Ils embarquent aussi les sandales de Nico en partant, peut être pour courir plus vite dans les sous bois... Nous retournons chercher assistance au village, mais les flics ne seront pas plus efficaces que ceux de Valparaiso.

Nous ne sommes pas superstitieux, mais en réalisant cette coincidence des dates, soyez sûrs d'une chose: le 27 de chaque mois, nous nous terrerons dans un bunker blindé surveillé par des militaires, et ce, pendant les 27 prochaines années!

Nous décidons de quitter le Pérou dans la foulée pour rejoindre l'Equateur. Nos premiers pas dans ce pays ne sont guère plus réjouissants.
Guayaquil est une chiure immonde à la surface de ce continent aux richesses innombrables. Véritable enfer urbain, dépotoir géant à l'ambiance machiste, nauséabonde et putride, il faut éviter à tout prix cette ville, ou la fuir en urgence si vos errances vous y conduisent. La ville pue. Ses rues défoncées n'ont d'égal que les gueules vérolées et balafrées des ivrognes qui s'entassent dans les caniveaux. La violence suinte de toute part. Une armada de flics, vigiles et gardes armés jusqu'aux dents quadrillent comme ils peuvent le vieux centre pourri. Rien n'y fait, ça craint à mort. Les gens pressent le pas quand ils sont obligés de sortir et se calfeutrent derrière de lourds rideaux de fer à l'arrivée. Cette ville est une prison poisseuse. Les grilles recouvrent toutes les fenêtres. On étouffe, et pas seulement à cause de la chaleur tropicale. Une seule avenue semble pratiquable et sous contrôle et nous n'avons d'autre choix que de suivre cette unique artère sécurisée. Quand la nuit tombe, la ville devient déserte, comme si elle était en état de couvre feu. Impossible de flâner nonchâlamment. S'aventurer dans les faubourgs relève du suicide.
Mais une promenade le long du fleuve sur le "malécon" truffé de boutiques branchées offre un moment de répit. Ensuite, la grimpette sur la petite colline de Las Peñas - micro paradis artificiel de ruelles étroitement surveillées et de maisonnettes colorées- sera la seule halte à l'atmosphère respirable. Aussitôt après, nous courons nous réfugier à l'hôtel pour enfiler des nanards saucissonnés de pubs dans notre chambre munie d'une télé avec câble. Nous passerons ainsi deux jours à attendre notre vol pour les Galapagos.